2034

Jeudi 11 septembre 4 11 /09 /Sep 07:43

Lundi 8 Mai 2034

 

Elles ont prévenu qu’elles ne rentreraient que demain. Ca tombe bien. On peut profiter à plein de ce long week end, Valentine et moi. Elle est adorable. Pleine de prévenances. Comme si j’étais ce qu’il y a de plus important au monde. Comme si rien d’autre ne comptait pour elle que de me donner un maximum de plaisir. J’en ai. A la folie. Et celui – évident – qu’elle prend à me l’offrir le démultiplie encore.

 

 

 

 

Mardi 9 Mai 2034

 

Ca y est !… Enfin !… Eh ben c’est pas trop tôt !… Depuis le temps qu’elle te tournait autour… Et que toi de ton côté… Je suis ravie pour toi… C’est beaucoup mieux quelqu’un d’expérience la première fois… Surtout pour toi… Qui te posais tant de questions… Qui t’en faisais tout un monde… Et alors ?… T’as trouvé comment finalement ?… Bien ?… - Oh oui !… Et même, à ce point-là, j’aurais jamais cru… - Ben oui, forcément !… On peut bien dire tout ce qu’on veut, mais qui, mieux qu’une femme, peut savoir comment s’y prendre avec une autre femme ?…

 

Elles acceptent toutes parfaitement la situation. Il faut reconnaître qu’elles seraient singulièrement mal placées pour y trouver quoi que ce soit à redire. La seule avec laquelle je me sois sentie quelque peu en porte-à-faux c’est Zanella… Qui a abordé d’elle-même le sujet… - C’est ma mère, oui !… Mais elle aurait pas intérêt à venir se mêler de mes histoires de cul… Alors je vois pas pourquoi j’irais mettre mon nez dans les siennes…

 

 

 

 

Vendredi 12 Mai 2034

 

« - Je ne connais personne d’aussi passif que toi… » Ce n’était pas dit sur un ton de reproche. Juste de constatation. Ce qui est vrai. Avec elle je m’abandonne. Je me laisse faire. Guider. Je ne prends pas la moindre initiative. Jamais. Son âge m’intimide. Et puis… je ne me suis jamais occupée d’une autre femme. J’ai peur de ne pas savoir, de me montrer si maladroite qu’elle va me rire au nez, me repousser… J’ai balbutié, lamentablement bafouillé… Elle m’a fait taire d’un baiser, m’a doucement pris la tête entre les mains, l’a guidée, posée sur son ventre. Je me suis bravement lancée. A tout petits coups de langue-découverte. Elle est plus âcre, plus acide, plus salée que moi. Elle a doucement ondulé du bassin avec un gémissement continu de fond de gorge. Je l’ai fouillée. J’ai fait chanter son bouton. On s’est endormies dans les bras l’une de l’autre…

 

 

 

 

21 heures

 

Ca m’a trotté toute la journée dans la tête… « - Je ne connais personne d’aussi passif que toi »… Il fallait l’entendre comment ?… J’ai fini par poser la question à Monelle qui a haussé les épaules… - Comment tu veux l’entendre ?… Comme elle l’a dit… - Elle a d’autres filles que moi alors… - J’en sais rien, moi !… Elle est très discrète sur sa vie privée Valentine… Mais ça paraît probable, oui !… - J’ai du mal à y croire… Quand elle me caresse, quand elle m’embrasse il y a tellement d’amour pour moi dans ses yeux… - Et alors ?… T’es trop, toi, dans ton genre !… C’est pas parce qu’elle t’aime que ça doit l’empêcher d’en aimer d’autres !… Non, mais attends !… Pendant des siècles avec les mecs on a joué au petit jeu du « T’es à moi… Je suis à toi… Tu m’appartiens… Je t’appartiens… » On a vu ce que ça donnait… Maintenant qu’ils sont plus là on va quand même pas remettre ça entre nous !… S’emprisonner les unes les autres… Se rabougrir à qui mieux mieux… Ce serait vraiment trop con… Non, tu crois pas ?…

 

Je sais pas… J’en sais rien… Je sais plus rien sur rien… Je me sens de plus en plus paumée…

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Dimanche 7 septembre 7 07 /09 /Sep 22:06

Mardi 2 Mai 2034

 

Le début des nouvelles restrictions d’eau c’était hier. Monelle s’est douchée avec Petra, sa copine. Zanella avec Aurore. Et moi la dernière, avec Valentine. Je me demandais comment elle allait réagir. Ca allait sûrement pas être facile pour elle de devoir se déshabiller complètement devant une gamine qui a la moitié de son âge. Moi à sa place… Mais non ! Ca a pas eu l’air en tout cas. Jamais on croirait qu’elle a 45 ans : un corps parfait. Des seins de rêve. Des fesses bien pleines et bien fermes. Je ne pouvais pas m’empêcher de la regarder. C’était plus fort que moi. Elle s’en est rendu compte. J’ai rougi. Elle a souri. J’ai quitté la salle de bains en toute hâte.

 

 

 

 

Jeudi 4 Mai 2034

 

En cherchant mes cours de l’année dernière je suis tombée, au grenier, sur un album de photos dont j’avais totalement oublié l’existence. Des photos d’avant. Un autre monde. Dont je sais – intellectuellement – qu’il a existé, mais auquel j’ai le sentiment de n’avoir jamais, moi, vraiment appartenu. Un peu comme si je feuilletais un livre d’Histoire. Oui, c’est ça. Mon père, mes frères ne me sont plus familiers que comme des personnages historiques. Ils n’ont pas, pour moi, d’autre réalité. Et c’est quelque chose de terrifiant.

 

 

 

 

Vendredi 5 Mai 2034

 

La douche avec Valentine est devenue une véritable épreuve pour moi. J’appréhende qu’elle me surprenne encore à la regarder et qu’elle me juge mal. Je fais tout ce que je peux pour que cela ne se reproduise pas, mais il y a forcément des moments où mes yeux se posent sur elle et des moments – ça peut pas être autrement, serrées comme on l’est dans cette cabine de douche – où je l’effleure par mégarde. Elle ne semble pas s’en apercevoir ou n’y attache pas la moindre importance.

 

 

 

 

19 heures

 

J’ai eu les résultats de mes premiers partiels. Une catastrophe. A laquelle je m’attendais. Je ne veux pas me chercher d’excuses, mais je ne suis pas la seule. Tout ce qui s’est passé ces derniers mois nous a toutes tenues à distance respectable de nos cours, devenus, par la force des choses, tout à fait secondaires. Et les examinatrices ont eu beau faire preuve d’infiniment d’indulgence c’est, dans l’ensemble, calamiteux. Pour que nous puissions nous investir individuellement dans nos études sans doute faudrait-il d’abord que nous ayons des perspectives d’avenir, que nous sachions collectivement où nous allons. Et ça !…

 

 

 

 

Dimanche 7 Mai 2034

 

Elles se sont disputées. Zanella accusait Monelle de tourner autour de sa copine. Ca a crié. Des gifles sont parties. Les deux autres s’en sont mêlées. Des portes ont claqué. On a fait des valises. On les a défaites. Et finalement tout le monde s’est réconcilié en grandes embrassades. Elles ont voulu aller fêter ça ensemble au restaurant et j’ai dîné en tête à tête avec Valentine. On a beaucoup parlé. Je lui ai raconté Kerwan. Jamais je n’avais parlé de lui comme ça. Aussi longtemps. A cœur ouvert. Même des choses que je ne m’étais jamais dites à moi-même. Elle m’a écoutée avec infiniment d’attention. Interrogée avec beaucoup de douceur. Je me suis épanchée. Sur tout. Et j’ai craqué. En interminables sanglots. Elle m’a prise dans ses bras. Je m’y suis blottie. Elle m’a caressé les joues, les paupières, les lèvres, murmuré à l’oreille des mots que je n’écoutais pas, mais qui m’apaisaient. Je me suis endormie tout contre elle. Dans la nuit j’ai vaguement senti qu’on me déshabillait, qu’on me mettait au lit.

 

Au réveil il faisait grand jour. Elle m’attendait pour déjeuner dans la cuisine. Seule. Les autres n’étaient pas rentrées… - Merci pour hier… Elle n’a pas répondu. Elle s’est contentée de sourire.

 

Sous la douche, après, avec elle, j’ai été prise d’une impulsion soudaine : j’ai jeté mes bras autour de son cou… - Merci… Oh si, merci !… Elle m’a serrée contre elle, seins contre seins. J’ai laissé tomber ma tête dans son cou. Elle a posé ses mains sur mes fesses. On n’a plus bougé.

 

- Viens !… Dans la chambre. Sur le lit. Appuyée sur un coude, elle m’a longtemps et amoureusement regardée… - Que tu es belle !… Elle est lentement descendue. Quand elle s’est approchée d’en bas je me suis ouverte. En grand. Pour ses yeux. Pour elle… Ses lèvres se sont posées sur moi, se sont occupées de moi. Je me suis engloutie dans un bonheur comme jamais.

 

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Jeudi 4 septembre 4 04 /09 /Sep 07:02

Jeudi 27 Avril 2034

 

J’ai passé l’après-midi chez Iliona. Elle va mieux. Les antibiotiques sont efficaces. Elle n’a plus de fièvre. Et surtout elle est rassurée. Elle a été infiniment touchée que je vienne la voir quand on ignorait ce qu’elle avait… - Tu es la seule… Il n’y a eu personne d’autre… Personne… - Faut pas leur en vouloir… On vit toutes des choses tellement compliquées en ce moment… - Oh, je leur en veux pas… J’en veux à personne… De toute façon, moi, avec les filles c’est jamais vraiment passé… Elles peuvent pas me voir… - Ne dis pas ça !… Zanella… Xadine… - Elles me supportent, c’est tout… Non, on ne m’aime pas… Les filles ne m’aiment pas… Et je le leur rends bien… Il y a qu’avec les mecs que je m’entends… Enfin que je m’entendais parce que maintenant… - Tu as tes contacts… - Oui, oh !… J’en ai fait le tour… Ca débouche sur quoi ?… Rien… Le type il se tape sa petite branlette… Il est content… Mais moi ?… J’ai besoin de sentir leur désir de moi contre moi, leur impatience dans mon cou, leurs caresses qui s’affolent, de voir leurs yeux quand plus rien d’autre ne compte pour eux que le bonheur d’être en moi et de s’y répandre… Alors… J’y vais toujours à l’ordi, oui… Pour en garder un maximum sous le coude au cas où ils finiraient par nous revenir… Mais j’y vais de plus en plus à reculons… C’est trop frustrant… Je me demande comment elles font les autres… - Il y en a de plus en plus qui se débrouillent entre elles… - Alors ça c’est un truc, moi, je pourrai jamais… Rien que d’y penser ça me dégoûte… - Toute seule aussi il y a des solutions… - Oui, oh, bof !… T’y arrives, toi ?… Moi, ça a jamais rien donné, mais alors ce qui s’appelle rien… Non… Une vie sans hommes je me dis de plus en plus que ça vaut pas la peine… Qu’il voudrait mieux crever…

 

 

 

 

Vendredi 28 Avril 2034

 

On s’y attendait : à partir du 1er Mai nouvelles restrictions d’eau. On devra impérativement respecter les quotas. Dès qu’on aura atteint le volume auquel on a quotidiennement droit – communiqué par voie de presse – le compteur sera automatiquement bloqué. Ce qui va nous contraindre à nous montrer extrêmement vigilantes. Notamment en ce qui concerne les douches. Pas d’autre solution que de les prendre ensemble. Deux par deux. En économisant au maximum.

 

 

 

 

Samedi 29 Avril 2034

 

Monelle a soupiré… - Mais lance-toi !… Une bonne fois pour toutes… Lance-toi au lieu de tourner comme ça indéfiniment autour du pot… T’en crèves d’envie… - Mais non, mais… - Non ?… Tu te vois pas !… Dès qu’on est toutes seules toutes les deux tu reviens là-dessus… Tu parles plus que de ça… Alors vas-y !… D’autant qu’il y en a une qui demanderait pas mieux… Rien qu’à la façon dont elle te couve des yeux… - Ah oui, qui ça ?… - Cherche un peu… Réfléchis !… Quelquefois on va chercher bien loin ce qu’on a tout près… Et elle m’a plantée là… Je me demande ce qu’elle a voulu dire, à qui elle peut bien faire allusion…

 

 

 

 

23 heures

 

Depuis que leurs copines sont pratiquement à demeure ici Monelle et Zanella ont complètement laissé tomber Christopher. Et c’est moi qui m’y colle. Pas forcément de gaîté de cœur. Parce qu’il est devenu lourd. Il arrête pas de se plaindre. Encore ce soir. On le sait que c’est pas drôle ce qu’ils vivent, mais nous non plus. Et c’est pas en ressassant sans arrêt que ça y changera quelque chose. Même les trucs de cul j’y ai plus vraiment de goût avec lui . C’est devenu toujours trop pareil. Et Iliona a raison. C’est frustrant au bout du compte. Je le vois. Il me voit. Il se touche. Je me touche. Et au revoir. T’as plus qu’à aller te coucher avec l’envie d’en avoir un vrai d’homme, un qui te prenne dans ses bras et qui te fasse vraiment l’amour, peau contre peau.

 

 

 

 

Dimanche 30 Avril 2034

 

Iliona m’est tombée dessus et a absolument tenu à ce que je l’accompagne à un espèce de Festival de folklore débile. C’était un prétexte cousu de fil blanc pour qu’on passe la journée ensemble. Je la vois venir : elle est toute seule, elle a personne et elle va s’accrocher à moi comme la moule à son rocher. Merci bien. Parce que si c’est pour l’écouter larmoyer pendant des heures comme elle l’a fait tout l’après-midi ! Christopher… Iliona… A croire que je suis prédestinée à ça. A servir de réceptacle aux jérémiades des uns et des autres. Qu’ils en profitent ! Parce que ça va pas durer…

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Dimanche 31 août 7 31 /08 /Août 18:15

Samedi 22 Avril 2034

 

Iliona est malade. Au téléphone sa mère était en larmes… - Venez, s’il vous plaît… Je vous en supplie, venez !… On sait pas ce qu’elle a… Le médecin pense que c’est le virus… Zanella a catégoriquement refusé… - Oui, ben moi, pas question !… Si c’est ça je tiens pas à l’attraper… - Mais ça s’attrape pas comme ça !… - Personne n’en sait rien… Et j’ai pas l’intention de prendre le moindre risque… J’y suis allée toute seule et je suis restée pétrifiée à l’entrée de sa chambre. Elle est méconnaissable. D’une pâleur effrayante. D’une maigreur terrifiante. Je me suis penchée pour l’embrasser. Elle était brûlante de fièvre… - Je suis foutue… - Mais non, faut pas dire ça… Tu vas guérir, tu verras… Elle m’a souri… - C’est gentil d’être venue… Elle a fait des efforts pour me parler, pour m’écouter et s’est tout doucement endormie. Je suis sortie sans bruit. Derrière la porte sa mère m’est tombée dans les bras en sanglotant … - Ma fille !… Ma petite fille !… Je veux pas qu’elle parte !… Je veux pas qu’on me l’enlève… - Vous êtes certaine que c’est le virus ?… - Il faut attendre les résultats de l’hémoculture, mais le docteur Thibaud est très pessimiste… - Pourtant il n’y a jamais eu le moindre cas chez les femmes !… - Jusqu’à maintenant…

 

On ne parle plus que de ça toutes les quatre. Et plus on en parle plus la situation nous apparaît sous les couleurs les plus sombres. Catastrophique. En deux heures on a vidé trois bombes d’insecticide. On se voit déjà toutes malades. Mortes. Monelle nous a remis à chacune une lettre qui contient ses dernières volontés. Zanella va prendre sa température toutes les dix minutes. Valentine s’efforce de se montrer rassurante, mais on sent bien que c’est pour nous rassurer, nous, et qu’au fond d’elle-même elle est tout aussi inquiète.

 

- Oh, mais c’est super, les filles !… On va bientôt être réunis alors !… Je vous attends… Dès demain matin je vous inscris… Je vous réserve les plus belles chambres… Ah, ces bons moments qu’on va passer ensemble !… On a coupé. On n’avait pas vraiment le cœur à rire.

 

 

 

 

Lundi 24 Avril 2034

 

Ce soir le verdict. Je suis morte de trouille. J’ai passé la journée d’hier terrée dans ma chambre. Dans l’état lamentable où j’étais pas question d’aller quêter du réconfort auprès de Xadine et de sa sœur. Ce n’est pas l’envie qui m’en manquait, ce n’est pas qu’elles me l’auraient refusé, mais si je ne leur rends visite que quand je suis au trente-sixième dessous elles vont finir par se lasser et par me considérer comme le boulet de service qu’on redoute de voir débarquer. La copine de Monelle est venue la voir. Je les ai entendues pleurer. A chaudes larmes. Toutes les deux.

 

 

 

 

18 heures

 

ELLE N’A RIEN !… Enfin si !… Des streptocoques. Mais c’est pas LE Virus…

 

 

 

 

Mardi 25 Avril 2034

 

On a fait une fête à tout casser. Toute la nuit. Toutes ensemble. Les deux copines aussi. Ce matin j’ai la gueule de bois. L’appartement est dans un désordre indescriptible. Faudra bien deux jours pour nettoyer et tout remettre en ordre. Mais d’abord DORMIR. Je suis soulagée. Tellement soulagée. Heureuse.

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Jeudi 28 août 4 28 /08 /Août 05:20

Jeudi 13 Avril 2034

 

C’est terrible. Epouvantable. Deux des hommes sur lesquels on expérimentait le vaccin sont morts. Trois autres sont malades. Autant dire que… Tout le monde accuse le coup. Il paraît que, dans certains centres, il y a eu des suicides dont on ne parle pas pour ne pas provoquer de réactions en chaîne. Christopher était effondré. En larmes. Des sanglots hoquetés. Comme un bébé. Il faisait peine à voir. On a tout essayé – tout ce qu’on a pu – pour lui remonter le moral. Rien à faire. On l’a laissé dans un état lamentable.

 

 

 

 

Lundi 17 Avril 2034

 

Je suis allée là-bas. Chaque fois que je traverse une mauvaise passe – et Dieu sait si c’est le cas en ce moment… il y a de quoi ! – c’est là-bas que j’ai envie d’aller. D’instinct. C’est Manon, la sœur de Xadine, qui m’a ouvert… - Elle n’est pas là… Elle est en Bourgogne avec un groupe… Mais tu peux rester si tu veux… En tout cas t’as une de ces têtes !… - Avec tout ce qui se passe… - Tu prends tout beaucoup trop à cœur… Ce qui ne change strictement rien à la situation… Et ne peut rien y changer… Tu vis… C’est déjà beaucoup… C’est énorme… Essaie d’en tirer le plus de bonheur possible… Bon, mais je te garde… Je te laisse pas repartir comme ça… Et j’ai passé tout le week end avec elle. On s’est promenées dans le parc. On s’est allongées dans l’herbe. On a parlé. On s’est tu. Des oiseaux pépiaient, voletaient. Tout bourgeonnait. Fleurissait. Plus rien d’autre n’existait. Plus rien d’autre n’a compté pendant deux jours. Que l’instant présent. Quand je suis repartie, hier soir, je l’ai serrée dans mes bras… - Merci…

 

 

 

 

Mercredi 19 Avril 2034

 

- T’y verrais un inconvénient ?… - A quoi ?… - A ce que, de temps en temps, je reçoive une copine ici… - Moi, non… Mais Zanella ?… Et Valentine ?… - Oh, Zanella, c’est sûrement pas elle qui va y trouver quoi que ce soit à redire… Au contraire… - Au contraire ?… Comment ça au contraire ?… - Elle profitera de l’occasion pour faire venir la sienne de copine… - Ah, parce que Zanella aussi ?!… - Ben, bien sûr !… T’avais rien remarqué ?… Le téléphone… Ses retours de plus en plus tard… Les nuits passées de plus en plus souvent dehors… - Et sa mère ?… Elle est au courant sa mère ?… - Evidemment  qu’elle est au courant… - Et elle dit rien ?… - Pourquoi voudrais-tu qu’elle dise quoi que ce soit ?… Elle voit sa fille heureuse et épanouie… C’est l’essentiel, non ?…

 

 

 

 

Vendredi 21 Avril 2034

 

Elles sont venues ce soir. La copine de Monelle ce n’est pas celle qu’elle nous a présentée au bar. C’en est une autre. Une petite brune toute bouclée avec un visage d’ange. Celle de Zanella, elle est rousse avec de grands yeux verts. Sympas. Toutes les deux. On a dîné ensemble. Elles étaient pressées de regagner les chambres et je me suis un peu attardée à table avec Valentine. On a parlé de tout sauf de ça. Christopher klaxonnait tant qu’il pouvait sur l’ordi. Je suis allé le rejoindre… - T’es toute seule ?… - Ca se voit pas ?… - Elles sont où les autres ?… - Pourquoi ?… Je te suffis pas ?… - C’est pas ça, mais… Il a joué au désespéré… Pris son air de chien battu… Il m’a agacée… Je l’ai planté là et je suis sortie. Sans but. Sans véritable envie. J’ai erré au hasard. J’ai pleuré. Sans savoir pourquoi. Je me suis accoudée au parapet du pont. J’ai regardé l’eau filer en éclaboussures de lumière. On est venu à mes côtés. Elle m’a touché le bras… - Tu es toute seule ?… - Je suis toute seule, oui !… Qu’est-ce que ça peut te foutre, connasse !… Je suis rentrée. Aucun bruit. Nulle part. Je me suis vengée de plaisir.

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